Soudan – On la connaît sous le nom de Mama Nour (Lumière en arabe), un nom qui incarne parfaitement son esprit. Nour Hussein Al Sewaty Mohammed a consacré sa vie à apporter de l'espoir et de la lumière à d'innombrables femmes et enfants soudanais confrontés à des difficultés inimaginables, même dans le contexte de la guerre qui divise aujourd’hui le Soudan.
Le parcours de Mama Nour a commencé dans l’obscurité de sa propre enfance. Orpheline très tôt, elle a grandi à Maygoma, le plus grand orphelinat du Soudan, situé dans la capitale, Khartoum.
Malgré les difficultés de son enfance, elle a travaillé sans relâche pour faire des études et avec une détermination inébranlable, elle a créé l'organisation Shama'a (Bougie) en 2007.
Depuis sa création, Shama'a fournit un hébergement, une éducation et des services essentiels aux femmes et aux enfants défavorisés. L'organisation est spécialisée dans l'aide aux personnes marginalisées par la société, notamment les femmes divorcées et les enfants orphelins. Grâce à des partenariats avec le gouvernement, les agences des Nations unies, les ONG internationales et les communautés locales, Shama'a a réussi à réintégrer des milliers de femmes dans la société, leur donnant une chance de reconstruire leur vie.
Cependant, la paix pour laquelle Mama Nour se battait depuis des années a volé en éclats le 15 avril 2023, jour où le conflit a débuté au Soudan entre les Forces armées soudanaises (SAF) et les Forces de soutien rapide (RSF).
Avec la montée de la violence, les rues de Khartoum autrefois joyeusement animées sont désormais le théâtre de scènes de désespoir, ravagées par l'assaut incessant des frappes aériennes, de l'artillerie lourde et des tirs d'armes à feu.
Face au danger imminent que couraient les mères et les enfants dont elle s'occupait, Mama Nour a pris la décision déchirante de les évacuer vers Wad Medani, qui représentait une promesse de sécurité après des jours de peur et de désespoir.
« La guerre a anéanti tous les efforts que nous avions déployés depuis 2007 », se souvient-elle. « Nous étions complètement paniqués. » Avec l'aide de ses partenaires, elle a réussi à sortir de Khartoum avec 20 femmes et enfants, dont des femmes enceintes et des nourrissons.
Wad Medani, située dans l'État d'Al Jazirah, est donc devenue un refuge pour des milliers de personnes fuyant le conflit à Khartoum, mais la violence s'y est propagée à la mi-décembre 2023, et la guerre les a rattrapés, accompagnée de son lot de chaos et de désespoir.
« Après plusieurs mois, la guerre est arrivée jusqu’à nous pour la deuxième fois et nous n'avons pas eu d'autre choix que de repartir », raconte Nour.
Après un voyage difficile, Mama Nour et les personnes dont elle s'occupe sont arrivées à Port-Soudan, sur la côte de la mer Rouge. L'un de leurs principaux défis a été de trouver un hébergement convenable, en particulier pour les personnes vulnérables qui nécessitaient une attention particulière. Assurer leur sécurité et leur confort est devenu une priorité absolue dans ce nouvel environnement.
Dans un premier temps, les femmes et les enfants se sont installés dans une école publique avec d'autres personnes déplacées, mais elle était bondée et inadaptée à leurs besoins. Cherchant désespérément une meilleure solution, Mama Nour a contacté le ministère de la Jeunesse et des Sports, qui a mis à leur disposition un vieux bâtiment qui, même s'il n'était pas en très bon état, avait l’avantage de leur offrir un toit.
« Nous avons finalement réussi à trouver un hébergement sécurisé, mais nous avons dû faire face à d’autres difficultés considérables, à savoir la recherche de nourriture et d'eau », explique Mama Nour.
Malgré les conditions difficiles dues au manque de place et de ressources, Mama Nour est restée dévouée à ceux qu'elle sert. Elle a mobilisé le soutien des Nations unies, des organisations humanitaires, des partenaires locaux et du secteur privé pour leur fournir des abris, de la nourriture et des produits de première nécessité. Grâce à ses efforts, les mères célibataires et les orphelins ont pu disposer d'un endroit sécurisé où vivre.
Avec le soutien de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), Shama'a a pu reconstruire des murs et créer une pièce réservée aux filles dans leur nouveau lieu. En outre, l'OIM a fourni de la nourriture, des kits d'hygiène et un soutien psychosocial à toutes les femmes qui y résident.
L'OIM, soutenue par le Fonds fiduciaire de l'Union européenne (EUTF), a renforcé les capacités des services du centre, ce qui a permis d'offrir une protection et une aide de qualité, rapide et bienveillante aux migrants vulnérables et aux femmes déplacées.
« Maintenant, nous avons une maison qui est presque entièrement équipée », a déclaré Mama Nour, alors que Shaam'a continue à acheter des meubles et à fournir tout le nécessaire pour héberger les mères et les enfants dans le besoin.
Au moins 11,7 millions de personnes ont besoin de services de protection - les femmes et les filles déplacées, réfugiées et migrantes étant particulièrement vulnérables. Des cas d'enlèvement et d'abus ont été signalés dans les zones touchées par le conflit, ce qui accroît les dangers auxquels sont exposés les civils.
Le conflit en cours a également soumis les enfants à des niveaux de violence et d'exploitation effrayants, les marquant physiquement et émotionnellement.
Les organisations dirigées par des femmes, comme Shama'a, jouent un rôle crucial en répondant à ces besoins urgents.
Malgré les défis insurmontables, l'esprit de Mama Nour reste intact. Elle continue de défendre les droits et la dignité des femmes et des enfants, déterminée à créer un avenir meilleur pour ces personnes dans la souffrance.
Cet article a été rédigé par Lisa George, responsable des médias et de la communication de l'OIM au Soudan.