Tijuana, 27 juin 2022 – Jessica, Jesse, Katherine, Beto et Josiane ont terminé les activités de la journée à Espacio Migrante, un refuge qui aide les migrants à Tijuana. Ils font partie d'une équipe qui travaille sur un projet créatif promu par l'institution, appelé « Migrant Telenovela ». Le projet consiste à écrire un sketch intitulé Enseignant, Vétérinaire, Astronaute.

Les “telenovelas” sont célèbres dans de nombreux pays d'Amérique centrale, notamment au Mexique. C'était l'occasion de créer un outil qui fournirait des informations sur l'accès des bénéficiaires à des services tels que l'éducation. L’idée de la réalisation de ce film est née de cette réflexion.

La “telenovela” raconte l'histoire de Maleshka, une jeune fille qui rêve d'étudier et dont le voyage commence sur la rivière Suchiate, à la frontière sud du Mexique et du Guatemala.

« L'histoire de la telenovela est celle d'une femme très forte, qui quitte son pays avec sa fille et veut aller dans un endroit sûr », explique Josiane Moukam, collaboratrice d'Espacio Migrante en tant que leader de la communauté africaine de Tijuana. « C'est la vie de la femme migrante, de la fille migrante... qui luttent pour le droit à l'éducation dans un pays étranger. »

Jesse Valcin est une migrante haïtienne qui joue dans la telenovela : « Quand vous arrivez dans une ville qui n'est pas la vôtre (...) vous n'avez personne pour vous soutenir (...). Ce sont des choses que vous voyez dans la telenovela ». Photo : OIM Mexique/Alejandro Cartagena

« La telenovela a pour fonction d'informer, également [...] de rendre visibles les obstacles que les enfants rencontrent dans les systèmes éducatifs, mais en même temps elle est un guide pour les migrants sur l'accès à l'information, qui, malheureusement, est souvent ce qui fait le plus défaut », explique Alberto Anaya, responsable du projet de “telenovela”.

Pour construire le scénario, l'équipe a organisé différents ateliers avec des familles et des enfants, et même avec le personnel de l'Organisation, afin d'entendre les histoires de leur périple pour arriver à Tijuana et les défis auxquels ils ont été confrontés en cours de route.

« Nous avons commencé à faire des ateliers avec les familles et à créer un scénario avec les producteurs », explique Katherine Gijón, organisatrice communautaire. « Chaque personne a raconté son histoire, a créé une histoire à partir de ses propres expériences et nous avons fait une fusion de tous ces éléments... Il y aura de nombreuses approches [dans l'histoire] que les parents et les enfants reconnaîtront. »

Pour Alberto Anaya, soutien au projet, le projet de « telenovela de migrants » vise à rendre visibles les obstacles que les enfants migrants doivent surmonter pour entrer dans le système éducatif au Mexique. Photo : OIM Mexique/Alejandro Cartagena

Jesse Valcin, leader de la communauté haïtienne d'Espacio Migrante, et sa sœur Jessica, se souviennent de certaines de leurs expériences. « Quand vous arrivez dans une ville qui n'est pas la vôtre, qui est différente de votre culture, où vous n'avez personne pour vous soutenir, dormir dans la rue, se tourner vers des organisations... Ce sont des choses que vous voyez dans la telenovela.»

Pour Josiane, la “telenovela” raconte sa propre histoire. « Dès mon arrivée à Tijuana, je dormais dans la rue, et dans la “telenovela”, j'ai joué ce rôle. Dès le début, j'ai joué le rôle à fond parce que c'est mavie... C'était une scène très forte parce que [le personnage] ne voit pas les gens à qui elle pourrait parler, c'était difficile. »

L'enseignement des ateliers, l’achèvement du scénario et le tournage ont nécessité plus de six mois et de nombreux sacrifices. Pendant tout ce temps, les organisateurs ont dû apprendre le scénario, le maquillage et la production.

Josiane Moukam, une migrante africaine, raconte comment l'actrice principale du film incarne une femme forte qui se bat pour donner une éducation à sa fille dans un pays étranger. Photo : OIM Mexique/Alejandro Cartagena

Malgré les difficultés, pour les sœurs Valcin, la “telenovela” a été une expérience d'apprentissage très particulière : « Le jour où nous avons vu la scène du fleuve, j'ai pensé : ‘C'est énorme, tout ce que les migrants ont dû endurer pour en arriver là’. Si personne ne vous le dit, vous ne pouvez pas le savoir... ». C'est un accomplissement et une leçon que je vais garder, parce que je ne savais pas qu'ils avaient traversé tout cela, ce sera quelque chose que je porterai dans mon cœur », dit Jessica.

« C'était amusant de travailler et d’en apprendre sur l’habillage et la coiffure. C'était agréable de voir chacun, à son propre rythme et avec sa propre personnalité, vivre son personnage dans la scène. Chaque fois que nous quittions un endroit, c’était un accomplissement de voir que chaque partie du scénario est réelle », explique Jesse, étudiante en psychologie qui, avec sa sœur, soutient les Haïtiens en leur fournissant des informations sur la régularisation des migrants et en leur enseignant l'espagnol.

Pour Katherine, jeune Hondurienne, ce fut également une expérience d'apprentissage très importante. « J'ai commencé à aimer le projet parce que je savais que ce que je faisais était l'histoire que quelqu'un d'autre avait vécue... Je me suis sentie représentée, il s'avère qu'une partie de moi était là. Au final, je pense que nous avons tous, y compris les familles, appris quelque chose. »

L'idée de réaliser ce film pour les migrants est née dans un refuge pour migrants qui est aussi une ONG. Les responsables du refuge Espacio Migrante ont réalisé que les personnes qui y séjournaient s'intéressaient aux telenovelas mexicaines, et ont décidé d'en faire une avec des migrants comme personnages principaux. Photo : OIM Mexique/Alejandro Cartagena

Tous soulignent que la “telenovela” est un cadeau de la communauté migrante à la communauté migrante elle-même. « C'est un cadeau pour les générations futures qui viendront à Tijuana, qui auront besoin d'avoir accès à l'éducation », dit Katherine. Josiane, une migrante camerounaise, partage le même sentiment : « C'est le cadeau que nous voulons faire, c'est un cadeau du plus profond de notre cœur. »

La participation des communautés d'accueil a permis d’enrichir la production de la “telenovela”. Le travail des bénévoles dans la production a contribué à façonner la sélection d'histoires. La réalisation de ce projet est le fruit d'un effort de collaboration entre les migrants et la communauté d'accueil, ce dont l'équipe se réjouit.

Actuellement, la “telenovela” est en phase de post-production, le refuge recherchant des fonds pour couvrir les coûts respectifs et faire en sorte qu'elle soit prête en avril ou mai 2023.

L'Organisation espère qu'elle atteindra différentes institutions culturelles, qu'elle sera diffusée dans le cadre d'activités telles que le Festival international du film sur la migration (GMFF) de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), et qu'elle servira de canal d'information efficace qui permettra au public d’en savoir plus sur les scénarios possibles de la réalité migratoire.

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