Cox's Bazar, 25 octobre 2021 - Lorsqu'on a demandé à Abul quel était son travail, il n'a pu que répondre : « Je ne fais rien, monsieur ». Cette première visite d'un responsable de projet de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) est encore fraîche dans la mémoire d'Abul, alors qu'il avait perdu tout espoir de retrouver un jour un emploi. Il est l'un des près d'un million de membres de la communauté de Cox's Bazar qui a perdu son travail au début de la pandémie de COVID-19.
Lorsque les restrictions de mouvement ont commencé à se renforcer en mars 2020, son emploi de conducteur d’auto-rickshaw est devenu superflu. Avec une jambe handicapée et ne voyant poindre aucune fin à la pandémie, sa recherche effrénée d'un nouveau revenu s'est vite avérée futile.
Selon le Bureau des statistiques du Bangladesh, Cox's Bazar est l'un des districts les moins performants du pays en matière d'éducation et de formation professionnelle, avec environ 33 pour cent de la population vivant sous le seuil de pauvreté. La COVID-19 a davantage menacé le bien-être de millions de personnes dans tout le pays, avec des licenciements massifs de travailleurs et une insécurité alimentaire généralisée.
Pour aider les membres de la communauté d'accueil à faire face aux nouvelles circonstances et à gagner leur vie, l'OIM a commencé à proposer des activités alternatives génératrices de revenus et a constaté que certains membres de la communauté préféraient les activités agricoles tandis que d'autres choisissaient d'autres opportunités.
L'OIM et ses partenaires organisent régulièrement des modules de formation sur l'élevage de volailles et de bétail, la culture de légumes, tandis que pour les activités non agricoles, les participants peuvent assister à des sessions sur la couture, la transformation du poisson séché, la plomberie et la transformation des aliments, entre autres.
En aidant les personnes vulnérables à acquérir les compétences nécessaires pour répondre aux exigences du marché du travail, le programme de moyens de subsistance de l’OIM vise à contribuer à la stabilité économique des communautés d'accueil.
« Ils m'ont demandé combien de membres composaient ma famille et si j'avais des parents », se souvient Abul. Au cours de l'évaluation, Abul a déclaré qu'il voulait continuer à travailler avec les auto-rickshaws et il a été invité à suivre une formation de 15 jours sur la mécanique des auto-rickshaws.
En outre, tous les participants ont suivi une formation de trois jours sur l’entreprenariat et la planification commerciale. L'OIM travaille avec des partenaires locaux pour mener des formations sur le développement des compétences, ce qui renforce l'efficacité et la flexibilité.
« Nous offrons aux membres de la communauté une formation sur le développement commercial, l'offre et la demande, et l'analyse du marché », explique Sharmin Akter, responsable du programme de moyens de subsistance pour l'OIM à Cox's Bazar. « Ces sessions sont essentielles pour que les participants puissent avoir un revenu une fois la formation terminée. »
Comme Abul, de nombreux jeunes du district ont depuis longtemps du mal à trouver des opportunités socioéconomiques décentes. Le chômage des jeunes dans les communautés d'accueil est lié à un manque de compétences générales et de réseaux pertinents pour accéder aux opportunités du marché.
Grâce aux projets de subsistance, l'OIM espère aider les jeunes à développer des compétences liées à la communication verbale et non verbale, à la créativité, à la création de réseaux, à la négociation, à la gestion du temps et aux compétences interculturelles. Ils sont également accompagnés pour la recherche d'emploi, notamment sur les endroits où trouver des offres d'emploi et la manière de postuler.
A l’issue de leur formation, les participants reçoivent une subvention en espèces pour les aider à se procurer des matières premières telles que des semences de qualité ou des outils agricoles. Depuis 2017, près de 11 000 membres de la communauté d'accueil ont eu accès à des moyens de subsistance. De même, plus de 6 000 réfugiés rohingyas ont bénéficié de services favorisant leur autonomie.
En septembre 2020, Abul et trois de ses amis ont uni leurs forces et leurs ressources pour lancer une coopérative : l'atelier de réparation d'auto-rickshaws « Friends Auto-Rickshaw Servicing Center ». L'atelier leur permet désormais de gagner un revenu et de soutenir leurs familles. La famille d'Abul, en particulier, compte beaucoup sur lui depuis la mort de son père. « Mes quatre sœurs, mon frère et ma mère comptent sur moi pour les aider ».
La mère et les sœurs d'Abul, comme beaucoup d'autres femmes bangladaises, sont les principaux soutiens de famille, mais elles ont du mal à trouver un emploi car les normes socioculturelles tendent à les cantonner à des opportunités économiques limitées. Cet obstacle pour les femmes accentue leur vulnérabilité et augmente le risque de violence et d'abus.
En outre, des milliers de personnes dans les sous-districts d'Ukhiya et de Teknaf à Cox's Bazar ont perdu leurs revenus et leurs biens lors des inondations dévastatrices qui ont balayé la ville ces derniers mois, mettant à rude épreuve les moyens de subsistance des communautés.
A travers ces projets, l'OIM cherche également à autonomiser les femmes et à les aider à accéder à des projets de subsistance au niveau des ménages, susceptibles de répondre aux demandes du marché. Grâce aux connaissances nouvellement acquises et aux subventions de départ, les participantes peuvent développer leurs propres projets individuels ou collectifs.
Jamila, membre de la communauté d’accueil, a longtemps eu des difficultés à joindre les deux bouts en vendant des balais et du bois de chauffage. Après avoir suivi une formation de cinq jours sur l'élevage de volailles et reçu sa subvention, Jamila et cinq autres femmes de sa communauté ont ouvert leur propre élevage de volailles, qui les aide désormais à subvenir aux besoins de leurs familles.
« Certaines d'entre elles ont mentionné qu'elles pensaient pouvoir économiser de l'argent pour leurs enfants également », explique Sharmin. « Elles espèrent qu'une fois que l'école aura repris, elles pourront payer leurs frais de scolarité pour qu'ils puissent poursuivre leur scolarité. »
Dès que les restrictions de mouvement liées à la COVID-19 ont été levées, le dur labeur des participants a porté ses fruits. Mais la pandémie étant loin d'être terminée, l'avenir semble incertain. « Nous avons toujours des clients, mais pas aussi souvent qu'avant », explique Abul. « Cependant, nous sommes optimistes et pensons que nos nouvelles compétences ne seront pas perdues. Cox's Bazar a toujours été prospère. La roue tournera. »
Les opportunités de moyens de subsistance de l'OIM pour les communautés d'accueil à Cox's Bazar sont rendues possibles grâce au soutien du Bureau de l’aide humanitaire de l'USAID, et au projet SAFE Plus géré conjointement par l'OIM, le Programme alimentaire mondial et l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture et actuellement financé par Affaires mondiales Canada, le Bureau des affaires étrangères, du Commonwealth et du développement, le Ministère norvégien des affaires étrangères, le gouvernement des Pays-Bas et le gouvernement du Royaume de Suède.
Cette histoire a été écrite par Monica Chiriac, responsable de l'information publique de l'OIM à Cox's Bazar, Tel : +880 1880 084 048, Email : mchiriac@iom.int