Burundi, 25 juillet 2022 – C'est au beau milieu de la nuit que le téléphone d'Amina* sonne. À moitié endormie, elle se réveille néanmoins pour répondre.

Pour elle, c'est habituel. Elle est assistante sociale et possède des années d'expérience dans la protection des victimes de traite d’êtres humains à l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) au Burundi.

« Est-ce l'OIM ? J'ai besoin de votre aide ! Je suis au Koweït. Aidez-moi à rentrer chez moi. »

Elle comprend la situation et se présente immédiatement à la jeune femme au bout du fil, établit un dialogue avec elle pour la mettre à l'aise et lui donne le temps de lui fournir plus de détails.

« S'il vous plaît, calmez-vous. Vous êtes en sécurité avec moi. Vous pouvez me raconter votre histoire. Cela restera entre nous », dit-elle à la jeune femme. « Nous ferons tout notre possible pour vous porter secours et vous aider à rentrer chez vous en toute sécurité. »

La victime s’appelle Céleste*, une jeune femme burundaise. Elle fait partie des milliers de victimes trompées et victimes de la traite à des fins de travail forcé dans le monde.

Elle s'était rendue au Koweït pour chercher un emploi après avoir été encouragée par son amie. L'espoir de sortir ses quatre enfants de la pauvreté grâce aux économies qu'elle pourrait mettre de côté pour créer sa propre entreprise était trop fort pour résister. 

Amina* a contacté l'Ambassade du Burundi et, ensemble, elles ont aidé Céleste à obtenir ses documents de voyage et à retourner au Burundi.

Travailler avec des victimes et des survivants de traite d’êtres humains a toujours été gratifiant pour Amina*, surtout une fois que les victimes ont été aidées à rentrer chez elles. Cela demande toutefois un effort de collaboration avec plusieurs acteurs.

« Nous travaillons beaucoup avec les associations et les points focaux locaux sur le terrain qui nous adressent des personnes potentiellement victimes de traite. Dans différentes provinces du Burundi, nous avons cartographié les acteurs de la protection qui pourraient remarquer des personnes qui sont revenues des pays voisins ou des États du Golfe. Plus les communautés sont informées sur la traite, plus elles peuvent les orienter vers une assistance. »

Des représentions théâtrales ont été utilisées afin de sensibiliser sur la traite d’êtres humains dans le pays. Photo : IOM 2022

Une fois le retour des survivants réussi, Amina* et ses collègues veillent à ce que les victimes reçoivent un soutien immédiat et à long terme, même après avoir retrouvé leur famille.

« Certaines victimes présentent des troubles psychologiques très profonds, ou parfois d'énormes cicatrices. Je suis souvent choquée par les histoires que j'entends. Je dois leur offrir de l'attention et écouter leurs récits et leurs difficultés. Je dois les aider et leur montrer qu'il est possible pour elles de recommencer leur vie. »

Le Burundi, comme de nombreux autres pays, n'échappe pas aux griffes des trafiquants qui profitent de la vulnérabilité des victimes, tant à l’intérieur du pays qu'à l'étranger. Les adultes comme les enfants sont contraints au travail forcé, à la servitude domestique, à la prostitution et à d'autres formes d'exploitation sexuelle dans toute la région et à travers le monde.

Selon le Bureau américain des affaires internationales du travail, les jeunes filles burundaises font l'objet d'un trafic international à des fins d'exploitation sexuelle commerciale au Kenya, au Rwanda, en Ouganda, en République démocratique du Congo et dans des pays du Moyen-Orient.

Au Burundi, le travail forcé constitue la majorité des cas dans le travail domestique et la garde d'enfants, l'agriculture, l'hôtellerie, la construction, la mendicité et le colportage. On estime que 66 pour cent des victimes sont des femmes et des filles, souvent destinées au travail domestique forcé, à l'exploitation sexuelle et au mariage forcé dans les pays voisins ou les États du Golfe. Les réfugiés burundais, les déplacés internes et les personnes résidant dans les provinces frontalières sont les plus exposés à la traite d’êtres humains.

Les sources de données de l'OIM montrent que plus de 1 000 victimes de traite d’êtres humains ont été identifiées et aidées au Burundi depuis 2017. Le gouvernement du Burundi a considérablement accru les enquêtes et les poursuites concernant les délits de traite présumés, a condamné des trafiquants et a orienté les victimes pour une assistance. Le pays a également institutionnalisé la formation à la lutte contre la traite pour les forces de l'ordre, les procureurs et les fonctionnaires de justice.

L'OIM aide le gouvernement à coordonner les efforts des ministères et des organismes chargés de l'application des lois afin de renforcer la législation, les politiques et les règlements en matière de lutte contre la traite, sur la base des 3P : Prévenir, Protéger et Poursuivre. En outre, l'Organisation aide le gouvernement à améliorer la capacité des organismes chargés de l'application des lois et de la justice et à sensibiliser le public à la prévention et à la suppression efficaces de la traite des personnes, aux droits fondamentaux des populations et aux procédures opérationnelles standard pertinentes.

La protection est une étape essentielle du processus et l'OIM au Burundi s'est fixé comme priorité d'augmenter le nombre d'identifications pour soutenir les victimes et les survivants de la traite d’êtres humains et de l'exploitation.

L'OIM travaille avec les partenaires locaux pour renforcer les efforts de partenariat et de coordination dans la lutte contre la traite d’êtres humains. Malgré ces progrès, il reste beaucoup à faire pour améliorer davantage la prévention, la protection et les poursuites dans le pays.

Pour Amina* et les autres agents de gestion des cas qui répondent aux victimes de traite, les appels qui arrivent sont d'une importance vitale.

Les noms ont été changés pour protéger leur identité.

Cette histoire a été écrite par Laëtitia Romain, responsable des médias et de la communication, OIM Burundi.

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